Entre soutien, discrétion et résilience : Jean Piaget et les psychologues réfugiées juives de 1933 à 1945.

Entre soutien, discrétion et résilience : Jean Piaget et les psychologues réfugiées juives de 1933 à 1945.

!! Attention, pour assister à l’évènement, 
réservation obligatoire au 022 327 93 20 ou info@shag-geneve.ch

Jeudi 24 sept. 2020
18 h. 30

Archives d’État

Conférence de M. Marc J. Ratcliff,

Archives Jean Piaget & FPSE, Université de Genève

Au cours de cette présentation, le conférencier nous exposera les moyens par lesquels le psychologue Jean Piaget – ainsi que les membres de l’Institut Rousseau des sciences de l’éducation à Genève (abrégé IJJR) – ont aidé les réfugiées juives du début des années 1930 jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Depuis sa création en 1912, l’IJJR a accueilli de nombreux élèves réfugiés et les années 30 ont vu une augmentation du nombre d’élèves juifs. Les Archives montrent que Piaget a été fort actif pour les soutenir, particulièrement les psychologues juives d’Allemagne et des pays de l’Est, en les aidant à rester à Genève et en intervenant pour organiser leur départ dans des pays plus sûrs. Il a utilisé à cette fin son influence et ses réseaux, formels et informels. Ceci, dans un souci de discrétion qui, jusqu’à aujourd’hui, avait entièrement fait oublier cet épisode. Toutefois, le soutien n’est qu’un volet de l’affaire. Les réactions des acteurs et actrices, que l’on peut identifier comme de la résilience, constituent une partie essentielle de l’histoire et contribuent à expliquer les destinées individuelles. M. Ratcliff suivra les chemins et les formes de résiliences de trois psychologues juives, Renate Kersten, Mariane Wohlgemuth et Kate Wolf, ayant, grâce à l’aide de Piaget, émigré respectivement en République Dominicaine, au Brésil et aux Etats-Unis.

Marc J. Ratcliff est Dr en psychologie (1995) et en histoire des sciences (2002), MER en FPSE, section de psychologie, Université de Genève, où il enseigne l’histoire de la psychologie et l’épistémologie. Il est l’auteur de nombreuses publications d’histoire des sciences, d’épistémologie et d’histoire de la psychologie.

© Achives institut Jean-Jacques Rousseau. Photographe présumé: Edouard Claparède

Empreintes sportives

Empreintes sportives

par Monsieur Flavio Borda d’Agua,
commissaire de l’exposition

Samedi 22 février 2020 à 11 h.00

Archives d’État de Genève, Ancien Arsenal,
1, rue de l’Hôtel-de-Ville

Quelle est l’évolution de la pratique du sport à Genève ? Quel est son rapport avec l’espace urbain et la toponymie ? Les noms de rues qui portent une appellation sportive ont-ils un lien direct avec une discipline particulière ? Pourquoi parler de Rois à Genève ? Quelle influence la cité a-t-elle eue sur le développement et l’affirmation de certains sports ? Et surtout, que reste-t-il de l’esprit sportif des temps passés ?

L’exposition présentée aux Archives d’État met en scène une quinzaine de sports montrant leur présence forte à Genève, dont certains depuis le Moyen Âge : jeu de paume, nautisme, arc, arquebuse, équitation, escrime, boxe, sports d’hiver, natation, automobilisme, cyclisme, rythmique et gymnastique rythmeront la visite du public à travers leurs empreintes urbanistiques.

Évoquer le sport, c’est également l’occasion de mentionner des projets urbanistiques qui ont changé le visage de Genève. Divers aménagements destinés à accueillir une quinzaine de sports différents ont disparu avec l’apparition d’immeubles à la place d’anciennes infrastructures sportives. Ainsi, l’un des axes de l’exposition est d’inscrire ces activités sportives dans la toponymie genevoise et de montrer que le sport a une véritable empreinte dans les rues et l’espace urbain de la cité.

Flávio Borda D’Água est archiviste aux Archives d’État de Genève et Conservateur adjoint à l’Institut et Musée Voltaire de la Bibliothèque de Genève. Il consacre une grande partie de ses recherches autour de la police à Lisbonne au XVIIIe siècle ainsi qu’à la réception des Lumières. En marge de ses recherches, et dans le cadre de ses fonctions professionnelles, il met en œuvre des projets de valorisation du patrimoine dix-huitièmiste par l’intermédiaire d’expositions, de colloques, de conférences et d’activités de médiation scientifique et culturelle. Il participe également, et activement, dans les réseaux scientifiques internationaux et est l’auteur de deux monographies et de plus de trente articles. Flávio Borda D’Água est par ailleurs très actif dans les sociétés scientifiques, savantes et professionnelles parmi lesquelles la Société académique, la Société suisse d’histoire, la Société d’histoire de la Suisse romande, la Société d’histoire et d’archéologie de Genève, dont il est le trésorier. Il est également membre de l’ICOM Suisse, de l’ICA et depuis janvier 2019 délégué à l’UNICEF Suisse et Liechtenstein.

 

 

Le Cœur de l’Europe. Genève et son œuvre humanitaire pendant la Première Guerre mondiale.

Le Cœur de l’Europe. Genève et son œuvre humanitaire pendant la Première Guerre mondiale.

par M. Cédric Cotter
chercheur en droit et politiques humanitaires au CICR

Jeudi 16 janvier 2020
à 18h30
Archives d’État de Genève

Pendant la Première Guerre mondiale, la Suisse a vécu une expérience particulière. Sans être en guerre, elle n’a pas vécu une situation de paix pour autant. Les conséquences du conflit ont largement affecté le pays et engendré de nombreuses difficultés pour la population et ses autorités. L’humanitaire s’est révélé être à la fois un symptôme et un remède à cette situation. Ville hôte du CICR et de très nombreuses organisations charitables, Genève a joué un rôle central dans l’œuvre humanitaire de la Suisse.

Cette conférence se propose d’aborder succinctement ce sujet et, à travers plusieurs questionnements, de mettre en évidence quelques-unes des principales caractéristiques de la Genève humanitaire à cette époque. Quelles œuvres charitables ont été initiées depuis Genève, et par qui ? À qui s’adressaient-elles ? Cet engagement a-t-il été massif ? Enfin, en quoi l’allègement des souffrances de la guerre a-t-il contribué à mieux vivre cette période de doutes et de craintes, entre la guerre et la paix ?

Cédric Cotter a étudié l’histoire et la philosophie à l’Université de Genève. Il a ensuite occupé plusieurs fonctions au siège du CICR de 2009 à 2011 avant de rejoindre en 2012 un projet du fonds national suisse de la recherche scientifique consacré à l’histoire de la Suisse pendant la Première Guerre mondiale et réunissant les Universités de Zurich, Berne, Lucerne et Genève. C’est dans ce cadre qu’il a défendu fin 2016 sa thèse intitulée (S’)Aider pour survivre. Action humanitaire et neutralité suisse pendant la Première Guerre mondiale. Celle-ci a été publiée chez Georg éditeur et est co-lauréate du prix d’histoire 2017 de l’Institut national genevois. Il compte une dizaine de publications essentiellement liées à l’histoire de l’action humanitaire. Cédric Cotter occupe actuellement la fonction de chercheur en droit et politiques humanitaires au CICR et travaille sur l’impact du droit international humanitaire dans les conflits armés passés et contemporains.

© Archives audiovisuelles du CICR (n°V-P-HIST-03530-02)

 

 

L’aliéniste Paul Louis Ladame (1842-1919) : séparer le malade du coupable et le criminel de l’innocent.

L’aliéniste Paul Louis Ladame (1842-1919) : séparer le malade du coupable et le criminel de l’innocent.

par M. Michel Porret
professeur d’histoire moderne à l’Université de Genève

Jeudi 5 décembre 2019
Aux Archives d’État de Genève

Né à Neuchâtel, élève du psychiatre humaniste Wilhelm Griesinger de Zurich, éminent praticien, philanthrope, directeur de l’orphelinat de Dombresson (1880-1883), médecin légiste, hygiéniste, criminologue, adepte de la médecine sociale, « anthropologiste » et historien, membres d’innombrables sociétés savantes, orateur remarqué en 1896 au IVe Congrès international d’anthropologie criminelle (Genève), Paul-Louis Ladame a laissé près de 200 publications qui déploient les enjeux de ses savoirs enseignés durant sa charge de privat docent (24 ans) aux facultés de médecine et de droit à l’Université de Genève.

Familier des archives judiciaires, il y exhume notamment le procès de Michée Chauderon (ultime « sorcière » exécutée à Genève – 6 avril 1652) qu’il publie en 1888 dans la Bibliothèque diabolique de son confrère neurologue de Bicêtre Désiré-Magloire Bourneville (1840-1909). Préoccupé par la généalogie de la médecine mentale, il rédige la biographie intellectuelle de l’aliéniste précurseur genevois Gaspard De la Rive (1770-1834) et s’intéresse aussi avec le psychiatre de Saint-Anne Emmanuel Régis (1855-1918) à la pathologie régicide de l’anarchiste Luigi Lucheni (1873-1910). Alarmé par les ravages de l’alcoolisme, du suicide et de la prostitution, compatissant à la détresse institutionnelle et morale des enfants orphelins, abolitionniste de la mort pénale, théoricien du « patronage des aliénés en Suisse », il est notamment expert pour la défense au « procès mémorable » de Jeanne Lombardi égorgeuse à Genève de ses quatre enfants en 1885 dont il publie une longue relation dans les Archives de l’Anthropologie criminelle et des sciences pénales (1886-1887) d’Alexandre Lacassagne (1843-1924).

Incarnant avec d’autres médecins la conquista aliéniste fin de siècle, il consacre sa leçon d’ouverture à l’Université de Genève (30 octobre 1886) à la médecine légale de la folie homicide. Éthologiste de la criminalité qu’il lie à la question sociale de la misère que l’État devrait prévenir, Ladame vise à objectiver la nosographie de la folie criminelle. Selon lui, l’alliance épistémologique entre l’anthropologie criminelle du milieu social et la psychiatrie médico-légale permettront de séparer le « malade du coupable », le « criminel de l’innocent » et les « scélérats responsables » des « aliénés irresponsables ». Cette communication suivra les grandes lignes du projet médico-légal de Paul-Louis Ladame.

Professeur d’histoire moderne UNIGE, coordinateur de l’équipe DAMOCLES, fondateur et rédacteur de Beccaria. Revue d’histoire du droit de punir, président des Rencontres internationales de Genève, Michel Porret vient de publier : Le sang des Lilas. Une mère criminelle égorge ses quatre enfants à Genève en 1885, Genève, Georg, automne, 2019.

 

Les inédits du Journal de Colladon

Les inédits du Journal de Colladon

par Monsieur Patrice Delpin,
enseignant d’histoire à la retraite  

Jeudi 14 novembre 2019 à 18 h. 30
Archives d’État de Genève, Ancien Arsenal

1, rue de l’Hôtel-de-Ville

 

En 1883, une copie du Journal d’Ésaïe Colladon (1600-1605), acquise deux ans auparavant, est transcrite et éditée par le célèbre libraire genevois John Jullien avec une introduction de l’Archiviste d’État Théophile Dufour.

135 ans plus tard, l’identification du manuscrit autographe va être l’occasion d’une réédition complète, avec de nombreuses corrections et des ajouts, accompagnée d’un commentaire scientifique.

Plusieurs passages inédits d’une à soixante lignes seront révélés, le plus spectaculaire étant une description des derniers jours, du décès et de l’enterrement de Théodore de Bèze par son ami et médecin personnel, Esaïe Colladon lui-même.

Patrice Delpin, enseignant d’histoire au Collège à la retraite (ancien secrétaire de la SHAG), poursuit des recherches sur les récits de l’Escalade de 1602 ; il a découvert plusieurs documents et textes inédits, dont ceux présentés ce soir.

BGE, Ms. suppl. 30/24, fol. 174

Les origines genevoises de l’économie politique de Sismondi

Les origines genevoises de l’économie politique de Sismondi

par Monsieur Pascal Bridel,
professeur honoraire d’économie politique à l’Université de Lausanne

Jeudi 31 octobre 2019 à 18 h. 30 

Archives d’État de Genève, Ancien Arsenal
1, rue de l’Hôtel-de-Ville

 

Dans la foulée de la récente édition des Œuvres économiques complètes de Sismondi (6 volumes, Paris, Economica, 2012-2019), cette communication s’efforce de situer les racines genevoises de l’économie politique sismondienne. Initiée dès la Statistique du département du Léman (1801) et La richesse commerciale (1803), la philosophie politique de Sismondi inaugure la difficile intégration de la théorie économique dans son ambitieuse trilogie « liberté-bonheur-richesse » qu’il poursuivra tout au long de sa carrière.

Surplombée par une vision romantique des relations économiques dans de petites structures politiques (les républiques italiennes du Moyen Âge et sa bien-aimée Ginevra celeste), l’économie politique sismondienne dépasse néanmoins très largement ses origines genevoises pour atteindre, dans sa critique de la chrématistique des économistes anglais, une formulation universelle qui trouve encore aujourd’hui toute son actualité : « La richesse est-elle le but de la société, ou le moyen d’atteindre son but ? » écrit-t-il encore et toujours en 1838.

Quelques réflexions sont également offertes sur l’opposition entre la « liberté des modernes » (ou liberté civile) qu’il construit avec Benjamin Constant et la « liberté illimitée de l’industrie » des économistes anglais. Si la liberté civile est indispensable à la croissance économique, la poursuite exclusive de la richesse utilisant la concurrence de tous contre tous finit par nuire dangereusement à cette liberté des modernes.

Pascal Bridel est professeur honoraire d’économie politique à l’Université de Lausanne, PhD econ University of Cambridge, fondateur du Centre Walras-Pareto, ancien conseiller scientifique à la Banque nationale suisse, éditeur des Œuvres économiques complètes de Sismondi (2012-2018).

Portrait de  Jean-Charles-Leonard Simonde dit de  Sismondi (1773-1842),
économiste  et historien genevois,
© Bibliothèque de  Genève