«Aliénées jusqu’à la fureur»: les suicides féminins à Genève au XVIIIe siècle

«Aliénées jusqu’à la fureur»: les suicides féminins à Genève au XVIIIe siècle

«Aliénées jusqu’à la fureur»:

les suicides féminins à Genève

au XVIIIe siècle

 

Une conférence présentée par

Madame Eléonore Beck,
historienne,

assistante-doctorante à l’Université de Genève

Jeudi 28 avril 2022 à 18 h 30,

Archives d’État de Genève, Ancien Arsenal,
1, rue de l’Hôtel-de-Ville

À Genève comme partout ailleurs en Europe de l’époque moderne, la justice séculière poursuit et punit sévèrement l’«homicide de soi-même», considéré à la fois comme un crime contre soi, une atteinte à Dieu et une rébellion sociale. Le cadavre est dégradé publiquement, tandis que les biens du défunt sont confisqués au profit du gouvernement.

Au XVIIIe siècle, les sentences à l’encontre des corps des suicidés se raréfient pour être remplacées par des enterrements diffamants. Le désespoir apparaît par ailleurs moins associé à une emprise diabolique, qu’à des ressorts individuels et d’ordre pathologique. Dans les procédures de suicide, la «folie» suicidaire comprend une vaste gamme de «désordres de l’esprit» aux contours flous. «L’aliénation» est ainsi plus souvent attribuée aux femmes qu’aux hommes (Watt, 2001). Ce dimorphisme traduit des biais de genre partagés par médecins, magistrats et population judiciaire. Labile, l’aliénation peut en effet désigner des comportements transgressifs ou tenus pour anormaux dans les sociétés d’Ancien Régime.

Cette conférence propose d’explorer les liens étroits entre désordres de l’esprit et normes de genre sur la scène sociale du suicide. Une étude qualitative des suicides féminins au XVIIIe siècle permet d’observer des causes sous-jacentes à l’irrationalité supposée des désespérées: «mésintelligences» conjugales et familiales ou violences féminines apparaissent ainsi en filigrane de plusieurs de ces cas.

Eléonore Beck est assistante-doctorante à l’Université de Genève depuis février 2020. Elle a réalisé auparavant son mémoire de Master avec le professeur Michel Porret sur le suicide féminin à Genève au XVIIIe siècle (prix Arditi 2019). Menée sous la direction du professeur Andreas Würgler, sa recherche actuelle porte sur les liens entre identités de genre, pouvoirs politiques et espaces de sociabilité à la fin de l’Ancien Régime et pendant la période révolutionnaire, et cela dans une perspective comparative.

 Toute personne que le sujet intéresse est cordialement invitée. 

 

 

Image: Giotto di Bondone, Desperatio, Fresque de la chapelle des Scrovegni, 120x60cm, 1306 env.

Tintin: le petit Don Quichotte

Tintin: le petit Don Quichotte

Tintin: le petit Don Quichotte

Une conférence présentée par

Monsieur Michel Porret,
historien

Jeudi 31 mars 2022 à 18 h 30,

Archives d’État de Genève, Ancien Arsenal,
1, rue de l’Hôtel-de-Ville

Tout commence en 1930 dans la violence de la révolution bolchévique au pays des Soviets. Tout se boucle en 1986 dans l’univers huppé de l’art contemporain. Entre la lutte des classes et la polémique esthétique, la saga de Tintin en 12 000 vignettes est une quête du bien dans la cruauté de l’histoire contemporaine. De la Terre à la Lune, sous toutes les latitudes, flanqué du socratique Milou puis de l’ivrogne altruiste Haddock, le petit Don Quichotte affronte tous les bandits du monde. Retour sur la vaillance du globe-trotteur.

Professeur honoraire UNIGE, fondateur et rédacteur de Beccaria. Revue d’histoire du droit de punir, président des Rencontres internationales de Genève, Michel Porret vient de publier : Objectif Hergé, Presses de l’Université de Montréal, coll. « Champ libre », Montréal, 2021.

 Toute personne que le sujet intéresse est cordialement invitée. 

 

 

Image: Le Petit Vingtième, jeudi 22 mai 1930, le dilemme du globe-trotteur. © Hergé/Moulinsart, 2021.

Historiennes genevoises: quel engagement?

Historiennes genevoises: quel engagement?

Historiennes genevoises: quel engagement?

Une conférence présentée par

Madame Barbara Roth-Lochner,
historienne et archiviste

Jeudi 20 janvier 2022 à 18 h 30,

Archives d’État de Genève, Ancien Arsenal,
1, rue de l’Hôtel-de-Ville

En automne 2020, la Société genevoise des écrivains a mené une réflexion sur l’engagement des écrivaines et écrivains, et plus largement des intellectuels genevois. C’est dans ce cadre qu’a été posée la question de l’engagement des historiennes genevoises. Au début du XXe siècle, le simple fait de se livrer à la recherche historique et de rédiger des articles et des livres, dans un contexte très masculin, nécessite déjà un fort engagement. On peut ici mettre en avant la figure de Marguerite Cramer ou Frick-Cramer (1887-1963), qui se détourna, il est vrai, assez vite de l’histoire pour se consacrer au CICR. Alors qu’elles assistaient volontiers aux réunions de la Société d’histoire, les femmes ne furent admises comme membres à part entière qu’à partir de 1914. Si l’on en croit les procès-verbaux, la première conférence donnée par une femme date de 1930. Christiane Dunant devient, en 1963, la première présidente de la SHAG. Dans la seconde moitié du XXe siècle, les historiennes sont plus nombreuses. Dès lors, cet exposé se penchera sur celles qui ont fait preuve, à côté de leur carrière de chercheuse, d’un engagement pour une cause, telle que le féminisme, la défense du patrimoine, la politique…

Historienne de formation, Barbara Roth-Lochner a été archiviste d’État adjointe aux Archives d’État de Genève, puis conservatrice des manuscrits et des archives privées à la Bibliothèque de Genève. Elle est l’auteure de publications sur l’archivistique et sur l’histoire genevoise, principalement de l’Ancien Régime.

 

 

En raison de la situation sanitaire, prière de vous inscrire par mail à info@shag-geneve.ch ou par téléphone aux Archives d’État de Genève (022 327 93 20). Conformément aux mesures sanitaires, le port du masque est obligatoire durant la conférence et le pass sanitaire est requis (mesures cantonales; recommandations de la Ville de Genève).

 

 

 Marguerite Frick-Cramer vers 1942, Wikimedia commons et archives du CICR.

Hippolyte-Jean Gosse et la Salle des Armures

Hippolyte-Jean Gosse et la Salle des Armures

par Madame Corinne Borel
historienne de l’art

Jeudi 21 octobre 2021 à 18 h. 30,

Archives d’État de Genève,
1, rue de l’Hôtel-de-Ville


« Admirable dilettante » aux multiples activités et aux intérêts éclectiques, Hippolyte-Jean Gosse (1834-1901) est l’une des figures marquantes de la Genève de la seconde moitié du XIXe siècle. Parallèlement à sa carrière de médecin, de professeur et de magistrat, et en marge de nombreuses autres occupations, ce travailleur acharné passionné d’archéologie dirige les différentes collections archéologiques et historiques de la Ville et de l’État.

Si l’archéologie, en particulier préhistorique, demeure son domaine de prédilection, il exerce également, de 1870 à sa mort, la fonction de conservateur de la Salle des Armures, devenue Musée historique genevois à la suite de la cession de la collection des « anciennes armures » à la Ville. « Après une ère de dilapidation les armes anciennes de l’Arsenal ont trouvé un protecteur en la personne de M. le Dr Gosse, qui en a fait le Musée aimé du public » : c’est en ces termes que Jacques Mayor rend hommage en 1899 à l’homme qui présida aux destinées de l’institution pendant plus de trois décennies. Cette communication se propose de mettre en valeur le rôle de Gosse dans la genèse et le développement de cet ensemble patrimonial emblématique, qu’il n’eut de cesse de préserver, d’enrichir – y compris par maints dons personnels – et de diversifier, permettant ainsi au Musée d’art et d’histoire d’hériter en 1910 de l’une des principales collections d’armes anciennes de Suisse.

Corinne Borel, historienne de l’art, est attachée au domaine Arts appliqués du Musée d’art et d’histoire depuis 1998 et fut rédactrice de la revue Genava de 2008 à 2010. Spécialisée dans les armes anciennes, elle est l’auteur de publications sur le sujet. Dans le cadre du centenaire de la mort de Ferdinand Hodler (1853-1918), elle a réalisé au Musée d’art et d’histoire l’exposition Hodler et le guerrier suisse · De la figure historique à l’icône patriotique et travaille actuellement à un projet de réaménagement de la Salle des Armures.

 

 

Émile Pricam (1844-1919), Portrait d’Hippolyte Jean Gosse, détail, Genève, vers 1890. Photographie, 16,6 x 10,8 cm. BGE, inv. Icon P 1947 363. © Bibliothèque de Genève.

Genève diabolique ? Visions et divisions du monde au prisme de la filiation entre protestantisme et démocratie

Genève diabolique ? Visions et divisions du monde au prisme de la filiation entre protestantisme et démocratie

par Monsieur Marc Aberle
docteur en histoire de l’Université de Neuchâtel,
post-doctorant et chargé de cours à l’Université de Genève

Samedi 16 septembre 2021 à 18 h. 30,

Archives d’État de Genève,
1, rue de l’Hôtel-de-Ville


« Là est la part de Genève dans la formation de l’État moderne. La démocratie y apparaît comme la face politique de la Réforme ».

En 1923, les mots de l’historien Charles Borgeaud, inspirateur et promoteur du Mur des Réformateurs, sonnent comme un hommage appuyé au rôle de Genève et du calvinisme dans l’émergence du monde politique moderne et de nos démocraties libérales.

Près d’un siècle plus tôt, en 1835, alors que les préparatifs du jubilé de la Réforme vont bon train, Jean-François Vuarin profite de l’inauguration de la statue de Rousseau sur l’île éponyme pour souligner un lien similaire, mais chargé négativement : « Dans l’hypothèse du triomphe des monarchies, telles que le temps les as faites, la statue de Rousseau ne s’élèvera-t-elle pas contre Genève comme un terrible accusateur ? »

Dans l’histoire intellectuelle postulant une affinité élective entre le protestantisme et la démocratie, Genève semble captive de cette image ambivalente. Or, comment les auteurs à l’origine de ces représentations en clair-obscur appréhendent-ils le rôle du calvinisme en regard de l’émergence de la modernité politique et religieuse ? Qu’entendent-ils par protestantisme et par démocratie ? Quels motifs pourraient expliquer cette parenté saluée par les uns et diabolisée par les autres ? La conférence reviendra sur ces questionnements ayant jalonné une recherche historique récente et interrogera les représentations de la Genève réformée à l’époque contemporaine et moderne.

Marc Aberle est docteur en histoire de l’Université de Neuchâtel, où il a soutenu une thèse de doctorat intitulée La démocratie du croire. Une histoire régressive de la généalogie politique du protestantisme et des républiques entre Suisse et France (xviiie et xixe – xvie siècle). Après avoir collaboré au projet FNS « Réformation et votations », dirigé par Olivier Christin, il est actuellement post-doctorant et chargé de cours à l’Université de Genève, où il s’occupe de la coordination des Sixièmes Journées suisses d’histoire.

 

Saconay Gabriel de, Généalogie et la fin des Huguenaux, & descouverte du Calvinisme: Où est sommairement descrite l’histoire des troubles excitez en France par lesdits Huguenaux, jusques à present, Lyon, Benoist Rigaud, 1573 (détail).

Le Cœur de l’Europe. Genève et son œuvre humanitaire pendant la Première Guerre mondiale.

Le Cœur de l’Europe. Genève et son œuvre humanitaire pendant la Première Guerre mondiale.

par M. Cédric Cotter
chercheur en droit et politiques humanitaires au CICR

Jeudi 16 janvier 2020
à 18h30
Archives d’État de Genève

Pendant la Première Guerre mondiale, la Suisse a vécu une expérience particulière. Sans être en guerre, elle n’a pas vécu une situation de paix pour autant. Les conséquences du conflit ont largement affecté le pays et engendré de nombreuses difficultés pour la population et ses autorités. L’humanitaire s’est révélé être à la fois un symptôme et un remède à cette situation. Ville hôte du CICR et de très nombreuses organisations charitables, Genève a joué un rôle central dans l’œuvre humanitaire de la Suisse.

Cette conférence se propose d’aborder succinctement ce sujet et, à travers plusieurs questionnements, de mettre en évidence quelques-unes des principales caractéristiques de la Genève humanitaire à cette époque. Quelles œuvres charitables ont été initiées depuis Genève, et par qui ? À qui s’adressaient-elles ? Cet engagement a-t-il été massif ? Enfin, en quoi l’allègement des souffrances de la guerre a-t-il contribué à mieux vivre cette période de doutes et de craintes, entre la guerre et la paix ?

Cédric Cotter a étudié l’histoire et la philosophie à l’Université de Genève. Il a ensuite occupé plusieurs fonctions au siège du CICR de 2009 à 2011 avant de rejoindre en 2012 un projet du fonds national suisse de la recherche scientifique consacré à l’histoire de la Suisse pendant la Première Guerre mondiale et réunissant les Universités de Zurich, Berne, Lucerne et Genève. C’est dans ce cadre qu’il a défendu fin 2016 sa thèse intitulée (S’)Aider pour survivre. Action humanitaire et neutralité suisse pendant la Première Guerre mondiale. Celle-ci a été publiée chez Georg éditeur et est co-lauréate du prix d’histoire 2017 de l’Institut national genevois. Il compte une dizaine de publications essentiellement liées à l’histoire de l’action humanitaire. Cédric Cotter occupe actuellement la fonction de chercheur en droit et politiques humanitaires au CICR et travaille sur l’impact du droit international humanitaire dans les conflits armés passés et contemporains.

© Archives audiovisuelles du CICR (n°V-P-HIST-03530-02)