Les inédits du Journal de Colladon

Les inédits du Journal de Colladon

par Monsieur Patrice Delpin,
enseignant d’histoire à la retraite  

Jeudi 14 novembre 2019 à 18 h. 30
Archives d’État de Genève, Ancien Arsenal

1, rue de l’Hôtel-de-Ville

 

En 1883, une copie du Journal d’Ésaïe Colladon (1600-1605), acquise deux ans auparavant, est transcrite et éditée par le célèbre libraire genevois John Jullien avec une introduction de l’Archiviste d’État Théophile Dufour.

135 ans plus tard, l’identification du manuscrit autographe va être l’occasion d’une réédition complète, avec de nombreuses corrections et des ajouts, accompagnée d’un commentaire scientifique.

Plusieurs passages inédits d’une à soixante lignes seront révélés, le plus spectaculaire étant une description des derniers jours, du décès et de l’enterrement de Théodore de Bèze par son ami et médecin personnel, Esaïe Colladon lui-même.

Patrice Delpin, enseignant d’histoire au Collège à la retraite (ancien secrétaire de la SHAG), poursuit des recherches sur les récits de l’Escalade de 1602 ; il a découvert plusieurs documents et textes inédits, dont ceux présentés ce soir.

BGE, Ms. suppl. 30/24, fol. 174

Les origines genevoises de l’économie politique de Sismondi

Les origines genevoises de l’économie politique de Sismondi

par Monsieur Pascal Bridel,
professeur honoraire d’économie politique à l’Université de Lausanne

Jeudi 31 octobre 2019 à 18 h. 30 

Archives d’État de Genève, Ancien Arsenal
1, rue de l’Hôtel-de-Ville

 

Dans la foulée de la récente édition des Œuvres économiques complètes de Sismondi (6 volumes, Paris, Economica, 2012-2019), cette communication s’efforce de situer les racines genevoises de l’économie politique sismondienne. Initiée dès la Statistique du département du Léman (1801) et La richesse commerciale (1803), la philosophie politique de Sismondi inaugure la difficile intégration de la théorie économique dans son ambitieuse trilogie « liberté-bonheur-richesse » qu’il poursuivra tout au long de sa carrière.

Surplombée par une vision romantique des relations économiques dans de petites structures politiques (les républiques italiennes du Moyen Âge et sa bien-aimée Ginevra celeste), l’économie politique sismondienne dépasse néanmoins très largement ses origines genevoises pour atteindre, dans sa critique de la chrématistique des économistes anglais, une formulation universelle qui trouve encore aujourd’hui toute son actualité : « La richesse est-elle le but de la société, ou le moyen d’atteindre son but ? » écrit-t-il encore et toujours en 1838.

Quelques réflexions sont également offertes sur l’opposition entre la « liberté des modernes » (ou liberté civile) qu’il construit avec Benjamin Constant et la « liberté illimitée de l’industrie » des économistes anglais. Si la liberté civile est indispensable à la croissance économique, la poursuite exclusive de la richesse utilisant la concurrence de tous contre tous finit par nuire dangereusement à cette liberté des modernes.

Pascal Bridel est professeur honoraire d’économie politique à l’Université de Lausanne, PhD econ University of Cambridge, fondateur du Centre Walras-Pareto, ancien conseiller scientifique à la Banque nationale suisse, éditeur des Œuvres économiques complètes de Sismondi (2012-2018).

Portrait de  Jean-Charles-Leonard Simonde dit de  Sismondi (1773-1842),
économiste  et historien genevois,
© Bibliothèque de  Genève

« Ce paquet n’a pas été porté par les hirondelles ». Les postes dans la République de Genève (1669-1790).

« Ce paquet n’a pas été porté par les hirondelles ». Les postes dans la République de Genève (1669-1790).

de Claude Danielle Barambon.

La République de Genève, minuscule État souverain, ne possède pas de poste propre. Ses relations extérieures, les besoins de son économie, ainsi que l’entretien des liens qui rattachent nombre de ses habitants soit aux membres de leurs familles établis à l’étranger, soit aux réseaux européens lettrés et savants, imposent toutefois la connexion de la ville à une système efficace de circulation de l’écrit.

À partir de 1669, la France puis Berne ouvrent en ville, avec l’accord circonspect des autorités genevoises, des bureaux de leurs postes. Ces institutions étrangères obéissent à leurs gouvernants respectifs, sous la houlette toutefois de directeurs genevois. S’engage une négociation permanente et souvent tendue entre la République et les instances postales et politiques des États concernés. Malgré les différends, malgré les « plaintes continuelles » concernant des tarifs jugés exorbitants, les liaisons postales sont régulières. Cartes, guides et almanachs permettent de prévoir la durée des trajets et le coût des envois. Les usagers cherchent à réduire les frais de port, à se prémunir contre les aléas des incessants conflits armés qui perturbent la communication postale, à gérer le trafic des paiements par lettre de change ou en numéraire, à dissimuler parfois aussi des activités illicites.

L’examen des activités des bureaux des postes genevois, du volume et des coûts des échanges, des modalités de réception et d’expédition du courrier, de la régularité et de la sécurité des envois montre une organisation efficace dont bénéficie l’Europe des Lumières.

 

Visite de l’exposition « Silences « 

Visite de l’exposition « Silences « 

par Madame Lada Umstätter,
commissaire de l’exposition,

Samedi 12 octobre 2019 à 11 h. 00 ,

Musée Rath
1, place de Neuve

Silencieux, les arts plastiques le sont par essence, comme le rappelle l’expression « image muette », employée dès l’Antiquité pour désigner la peinture. Mais toute œuvre d’art est-elle pour autant silencieuse ? Il est des peintures bavardes, criardes même, et d’autres qui se tiennent « coites ». Certaines incitent à l’intériorité de la prière, d’autres ouvrent à la contemplation de l’infini ; certaines nous laissent interdits ou dans l’effroi, d’autres, énigmatiques et secrètes, semblent une matérialisation de l’ineffable.

Mêlant les genres, les motifs et les époques, de la concentration des natures mortes aux grands espaces silencieux, de la scène de genre – expression d’un quotidien idéalisé ou lieu trouble du non-dit – à la scène religieuse se présentant comme une manifestation du sacré, en passant par l’autoportrait mélancolique, cette exposition propose une expérience de différentes formes du silence, envisagé non seulement comme absence de bruit, de son ou de parole, mais aussi comme un état, une présence au monde, dont certaines œuvres d’art nous offrent une forme condensée.

Lada Umstätter est conservatrice en chef responsable du domaine Beaux-arts au Musée d’art et d’histoire de Genève depuis 2017. Née à Moscou, elle y a étudié l’histoire de l’art à l’Université Lomonossov et a travaillé dans les domaines de la muséographie, de l’enseignement et de la communication culturelle en Russie, en Suisse, en Israël et aux États-Unis. Spécialiste de l’art suisse et européen du XXe siècle, ainsi que de l’art religieux contemporain et de l’histoire culturelle de l’URSS, Lada Umstätter a soutenu une thèse de doctorat en 2003. Enseignante à l’Université de Genève de 1999 à 2006, directrice du Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds de 2007 à 2017, elle a écrit plusieurs livres, dirigé ou participé à de nombreuses publications, et a été la commissaire de plus de cinquante expositions.

Luigi Rossi (1853-1923), Rêves de jeunesse, 1894,
© Musée d’art et d’histoire de Genève
Photo : D. De Carli
Écrire la Réformation de Genève François Bonivard, Antoine Froment, Michel Roset : les enjeux de la construction d’une « histoire officielle » genevoise au XVIe siècle

Écrire la Réformation de Genève François Bonivard, Antoine Froment, Michel Roset : les enjeux de la construction d’une « histoire officielle » genevoise au XVIe siècle

par M. Hadrien Dami,
assistant à l’Institut d’histoire de la Réformation,

Jeudi 26 septembre 2019 à 18 h. 30,

Archives d’État de Genève,
Ancien Arsenal,
1, rue de l’Hôtel-de-Ville,

Au milieu du XVIe siècle, peu de temps après l’indépendance de la ville et surtout l’adoption de la Réforme, Genève se dote de son histoire. François Bonivard, Antoine Froment et Michel Roset, sur une commande du Petit Conseil, composent des chroniques qui sont désormais bien connues des historiens genevois. Leurs trois récits s’inscrivent dans un même processus de rédaction d’une histoire « officielle ». Il convient à ce titre de considérer ces textes d’un œil nouveau, en nous interrogeant sur les constructions mémorielles et identitaires qui sont réalisées ainsi que sur la manière dont l’interprétation du passé proche légitime et justifie les événements récents. Une analyse textuelle des chroniques comprises dans un contexte de rédaction commun permet d’en dégager les enjeux ainsi que les visées de leurs auteurs, mais aussi de chercher à comprendre la censure, voire la mise à l’écart subie par Bonivard et Froment par rapport à Michel Roset, dont le récit semble avoir répondu aux attentes du Magistrat.

Hadrien Dami présentera la recherche qu’il a menée dans le cadre de son mémoire de maîtrise en histoire à l’Université de Genève, achevée en 2017. Il a travaillé depuis à l’édition des Registres du Conseil de Genève au temps de Calvin ; il est actuellement assistant à l’Institut d’histoire de la Réformation avec un projet de thèse portant sur la place éditoriale genevoise dans la circulation des idées religieuses et politiques en Europe au XVIIe siècle.

6e livre des Chroniques de Roset,
Archives d’État de Genève

Quel futur pour le passé ? Histoire et mémoire : les ennemis complémentaires

Quel futur pour le passé ? Histoire et mémoire : les ennemis complémentaires

par M. Christophe Rime, historien

Jeudi 6 juin, 18h30

Archives d’État de Genève,
Ancien Arsenal,
1 rue de l’Hôtel de Ville,

2014-2018 – des années de commémorations, des années où l’on s’emploie à fêter des centenaires ; les célébrations du souvenir sont partout, à chaque instant. Cette période du Centenaire de la Grande Guerre, qui promettait d’être hypermémorielle, a consacré l’empire de la mémoire comme rapport principal des sociétés occidentales au passé. Pourtant, le temps de la mémoire n’est pas chose nouvelle. En effet, il tend déjà, depuis les années 1980, à se positionner dans le rapport que les sociétés entretenaient à leur passé. Et plus la mémoire semble s’imposer comme usage social et politique du passé dans le présent, plus la science historique apparaît comme déstabilisée. Le passé est-il encore la garantie de l’avenir ou le mémorialisme joue-t-il dorénavant ce rôle dans le présent ? En quoi l’hypermnésie actuelle serait-elle devenue un piège à histoire ? C’est cette problématique que nous allons discuter au travers d’exemples tels que les commémorations, les lieux de mémoire, les tribunaux de la mémoire et quelques discours politiques synonymes de devoir de mémoire, le tout dans un cadre tracé par l’histoire du temps présent en France.

Christophe Rime est docteur ès Histoire et Civilisations à l’EHESS de Paris. Enseignant d’histoire au Collège de Genève jusqu’en 2017, il siège au comité des Rencontres Internationales de Genève et a contribué, en tant que Secrétaire général, à l’aventure du Roman des Romands. Il publie régulièrement dans le mensuel Scènes Magazine consacré aux scènes culturelles diverses et se prépare actuellement à publier sa thèse intitulée « Quel futur pour le passé ? Mémoire contemporaine : le retour aux temps mythiques », défendue en janvier 2018 et dirigée par les historiens François Hartog et Stéphane Audoin-Rouzeau.